Protection : comment faire?

Bonjour,

Je suis Frédéric, je vis au Maroc, dans le moyen Atlas, Ifrane, prof de français, c'est à dire ni botaniste, ni naturaliste mais simple amateur en voie d'éclairement... Pour faire aussi court que possible, je travaille dans une université, Al Akhawayn University, construite dans une petite ville de montagne, sous forme d'un campus fermé (clotûré à 100%). La plus grande partie du campus consiste donc principalement en une forêt de chêne vert ainsi qu'une garrigue totalement protégées du surpaturage qui est en train de détruire massivement l'écosystème de la région. Bref, nous avons un assez grand nombre d'orchidées qui poussent sur le campus et a priori, quasi exclusivement sur le campus : je marche beaucoup dans toute la région et les seules orchidées que j'ai vues hors campus sont anacamptis papillonacea et coriophora, alors qu'hier j'ai pu voir dans l'enceinte de l'université orchis olbiensis et conica, himantoglossum robertianum, ophrys sicula et ficalhoana. D'ici la fin de la saison, devraient apparaître au moins quatre autres espèces que j'ai vues l'année dernière. Bien sûr ce sont des espèces assez courantes, mais, première question, la présence d'une dizaine d'espèce sur un même lieu vous paraît-elle banale ou intéressante?
Mais ma vraie question est la suivante : vaut-il mieux, pour les protéger, continuer de faire mon travail en solitaire et pour mon plaisir et intérêt personnels ou devrais-je en parler (j'ai abordé le sujet vaguement avec diverses personnes qui semblaient toutes ignorer la présence d'orchidées sur le campus) communiquer, cartographier, multiplier les chances d'identifier des espèces, éventuellement pouvoir s'exprimer sur l'expansion de la construction de bâtiments...
Qu'en pensez-vous?

Bonjour Frédéric,
D' après ce document de l' UICN qui date de 2004, Ifrane se situe au cœur du Parc National éponyme. Il rappelle que le Moyen Atlas comporte une vingtaine de Sites d' Intérêt Biologique et Ecologique (SIBE) lesquels devaient donner lieu à des études pour déterminer ceux qui répondaient le mieux aux critères des ZIP (Zonnes d' Intérêt pour les Plantes).
Cette région fait donc l' objet d' attentions de la part de l' Administration des Eaux et Forêts et de la Conservation des Sols.
Il est donc possible qu' une règlementation existe déjà pour préserver la flore de ces aires protégées et que les espaces que tu cites y font partie.
Si cette règlementation existe, plusieurs questions se posent :
- quelle flore est protégée et quel est son statut ?
- quels sont les structures et les moyens de gestion de ces espaces (conventions de gestion avec les propriétaires ?)
À mon avis, avant d' entreprendre quelqu' action envers ton entourage, il te faut te renseigner sur place auprès des organismes en charge de ces questions et déterminer le statut des espaces que tu cites et celui des espèces d' orchidées que tu as recensées. Ce n' est qu' ensuite, muni de ces éléments, que tu pourras, à ton niveau, apporter ta contribution pour faire connaitre et éventuellement proposer des améliorations aux pratiques locales.
Se souvenir que toute mesure en faveur de la protection commence par l' information des intéressés.

Merci Geo pour ta réponse claire et précise... je crois malgré tout que la notion de parc régional est ici tout à fait théorique... encore une fois, les moutons sont en train de manger le pays, ici comme dans le haut Atlas. Je me souviens d'une rencontre avec un jeune berger sur le parc, qui définissait son métier comme : "je suis celui qui garde les moutons et qui coupe la forêt", il y a en effet tellement peu d'herbe qu'ils nourrissent les troupeaux de branchages. Tristement, les seuls endroits où des fleurs poussent encore sont des propriétés privées, clôturées.
Mais oui, tu as raison, je commence par me renseigner plus précisément sur la législation et les éventuelles mesures locales.
Merci encore

En complément :
Sur ce site tu trouveras quantités d' informations sur la biodiversité du Maroc.
En matière d' espaces protégés, le Parc National d' Ifrane fait l' objet d' un descriptif assez complet sous forme de documents téléchargeables au format PDF.
Le document de synthèse sur l' étude de la Biodiversité du PN d' Ifrane fait en effet état des pratiques pastorales dommageables à l' écosystème que tu mentionnes, et retient des zones prioritaires de restauration en proposant des objectifs prioritaires en matière de protection, ainsi que des mesures de gestion et de conservation de ce patrimoine naturel.
Le Plan d' aménagement et de gestion du Parc National date de 2007-2008.
Reste à vérifier que toutes ces mesures ont bien donné lieu à des actions concrêtes sur le terrain (mise en œuvre, contrôle et suivi).
Tu noteras au passage que seules les espèces endémiques sont citées et visées par ces mesures et que la famille des Orchidacées n' en comporte pas.