Probable triple hybridation ? ! ?
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GL
malawi38
jft2607
Christophe Boillat
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Probable triple hybridation ? ! ?
Lun 10 Aoû 2015 - 17:00
Suite à la présentation de GL et d'Olivier de ce fameux possible triple hybrides entre G. conopsea x G. corneliana x P. albida,
(Cf : https://ophrys.bbactif.com/t17240-weekend-dans-le-brianconnais-2eme-jour-04-07-15)
j'aimerais apporter ma pierre à l'édifice, à la réflexion par ce qui suit. Il s'agit d'un résumé d'un article que j'ai écrit pour le bulletin de la SFO-LA 2015 et qui traite des hybrides G. conopsea x G. rhellicani et G. odoratissima x G. rhellicani. CAMUS, GERBAUD et SCHMID parlent de possible triple combinaisons... en l’occurrence :
=> xG. suavolens x G. conopsea (xG. suavolens f. megastachya)
=> xG. suavolens x G. rhellicani (xG. suavolens f. brachystachya)
=> xG. heufleri x G. odoratissima (xG. heufleri f. megastachya)
=> xG. heufleri x G. rhellicani (xG. heufleri f. brachystachya)
Pour rappel : xG. suavolens = G. conopsea x G. rhellicani / xG. heufleri = G. odoratissima x G. rhellicani et en images.
G. conopsea x G. rhellicani / Pontresina (GR / CH) 12.7.2011
G. odoratissima x G. rhellicani / La Punt Chamues'ch (GR / CH) 15.7.2012
Mais place aux explications.
J’ai pris le temps de relire les divers documents qui me permettent de me faire une idée plus précise de ce sujet passionnant, mais délicat. J’ai pris comme référence de bas l’ouvrage suivant : Les hybrides des genres Nigritella et/ou Pseudorchis de Gerbaud et Schmid (1999).
Certes il n’y a pas directement un troisième parent qui entre en ligne de comptes dans ces « triples » hybrides, mais je trouve intéressants de s’y arrêter pour donner un éclairage. En effet par leurs as-pects extérieurs, ces plantes particulières ont, il me semble, des caractéristiques qui se rapprochent plus de l’un ou l’autre parent. Mais avant d’en arriver à ce stade il nous faut voir et porter à notre connaissance que pour que cela soit (triple hybrides), il nous faut deux générations de plantes. Autrement dit, la première année il y a l’hybride (simple H1) qui lui-même s’hybridera avec le parent X ou Y. De ce point de vue j’apporte un peu d’eau au moulin avec les illustrations suivantes :
G. heufleri avec Zygènes; La Punt Chamues'ch (GR / CH) 15.7.2012
G. suavolens avec capsules sèches; St-Luc (VS / CH) 12.7.2006
Ces illustrations nous montrent deux choses : la première, sur l’hybride un potentiel pollinisa-teur avec ce Zygène; et sur la seconde des capsules sèches qui donnent l’impression que ces ovaires étaient plein de graines. Ces graines étaient-elles fertiles ? La question reste entière. Mais aux vues des illustrations qui suivront, je suis en droit de me positionner en faveur d’une possible triple hy-bridations. La réponse à cette question aujourd’hui ne peut se trouver qu’à l’aide de la génétique. Je commence par :
xG. suavolens x G. conopsea
St-Luc (VS / CH) 12.7.2006
Chandolin (VS / CH) 23.7.2013
La longueur des éperons est, à mon avis, une caractéristique pertinente et discriminante. Le positionnement et la forme du labelle en seraient deux autres.
xG. suavolens x G. rhellicani
Chandolin (VS / CH) 14.7.2006
Chandolin (VS / CH) 14.7.2006
Malheureusement ces deux illustrations ne montrent pas la longueur de l’éperon. Par contre le positionnement du labelle et sa forme sont bien visibles. Nous constatons également la couleur particu-lière de ce possible triple hybride au milieu de ses parents respectifs.
xG. heufleri x G. odoratissima
La Punt Chamues'ch (GR / CH) 17.7.2005
Difficile de distinguer l’éperon, mais la forme générale de l’épi, sa couleur particulière, la position du labelle et sa forme me font dire que, certainement, ce peut-être un triple hybride.
xG. heufleri x G. rhellicani
La Punt Chamues'ch (GR / CH) 15.7.2001
Scuol (GR / CH) 16.7.2001
Pas d’éperon visible, malheureusement, mais la forme de l’inflorescence plutôt « rhellicani », la position du labelle et la forme générale de l’inflorescence me font pencher du côté d’une possible triple hybridation.
Cette présentation serait incomplète si l’on oubliait de citer les divers botanistes et orchidophiles qui, au cours des décennies précédentes, ont œuvrés à la compréhension et à l’élargissement de nos connaissances face à ces plantes pour lesquelles il est délicat d’y apporter un nom. Listes non ex-haustive : CAMUS, SCHRÖTER, SCHULZE, KERNER, ASCHERSON, GRAEBNER, GSELL, DANESCH, SCHMID, GERBAUD, GÖLZ, GRIEBL, REINHARD et d’autres que j’oublie certainement.
Je termine par un tableau de mesures (GSELL 1934 et 1942) faite sur les plantes qui nous intéres-sent. Ce sont les lignes et colonnes roses qui me semblent opportun de relever.
Ce sont les longueurs de l’éperon en lien avec la longueur de l’ovaire qui pourrait, à mon sens ap-porter quelques points d’attention. Pour G. conopsea la longueur de l’éperon est quasi le double de celle de l’ovaire (G. odoratissima quasi identique). Pour xG. suavolens nous retrouvons quasi le même rapport longueur de l’éperon / longueur de l’ovaire que G. conopsea. Pour xG. heufleri, l’éperon est la moitié moins long que l’ovaire. Pour le triple hybride xG. suavolens x G. conopsea (xG. suavolens f. megastachya), je trouve important de relever la mesure que GSELL apporte : 7mm pour la longueur de l’ovaire et 6 mm pour la longueur de l’éperon ; presque 1/1.
Dans le cas qui nous intéresse ici, le possible triple hybride G. conopsea x G. corneliana x P. albida, la longueur de l’éperon de conopsea devrait faire que ce dernier apporte la longueur au dit éperon. Sur les mesures que j’ai eu l’occasion de faire en ce qui concerne l’hybride G. rhelicani x P. albida, l’éperon est vraiment court (très petit). Il est d’environ 2 mm de longueur. La longueur de l’éperon de l’hybride G. conopsea x G. rhellicani est d’environ 5 mm. L’ovaire de ce même hybride est de 6 mm.
Tout ceci pour conclure qu’avec la longueur de l’éperon, la longueur de l’ovaire, ainsi que le rap-port entre les deux, les botanistes avertis pourraient certainement arriver à déterminer sur le terrain avec plus ou moins de certitude les parents de l’hybride ; mais la question reste ouverte. D’autres compléments sont certainement nécessaires.
Bassecourt, le 9 août 2015
Christophe Boillat
(Cf : https://ophrys.bbactif.com/t17240-weekend-dans-le-brianconnais-2eme-jour-04-07-15)
j'aimerais apporter ma pierre à l'édifice, à la réflexion par ce qui suit. Il s'agit d'un résumé d'un article que j'ai écrit pour le bulletin de la SFO-LA 2015 et qui traite des hybrides G. conopsea x G. rhellicani et G. odoratissima x G. rhellicani. CAMUS, GERBAUD et SCHMID parlent de possible triple combinaisons... en l’occurrence :
=> xG. suavolens x G. conopsea (xG. suavolens f. megastachya)
=> xG. suavolens x G. rhellicani (xG. suavolens f. brachystachya)
=> xG. heufleri x G. odoratissima (xG. heufleri f. megastachya)
=> xG. heufleri x G. rhellicani (xG. heufleri f. brachystachya)
Pour rappel : xG. suavolens = G. conopsea x G. rhellicani / xG. heufleri = G. odoratissima x G. rhellicani et en images.
G. conopsea x G. rhellicani / Pontresina (GR / CH) 12.7.2011
G. odoratissima x G. rhellicani / La Punt Chamues'ch (GR / CH) 15.7.2012
Mais place aux explications.
J’ai pris le temps de relire les divers documents qui me permettent de me faire une idée plus précise de ce sujet passionnant, mais délicat. J’ai pris comme référence de bas l’ouvrage suivant : Les hybrides des genres Nigritella et/ou Pseudorchis de Gerbaud et Schmid (1999).
Certes il n’y a pas directement un troisième parent qui entre en ligne de comptes dans ces « triples » hybrides, mais je trouve intéressants de s’y arrêter pour donner un éclairage. En effet par leurs as-pects extérieurs, ces plantes particulières ont, il me semble, des caractéristiques qui se rapprochent plus de l’un ou l’autre parent. Mais avant d’en arriver à ce stade il nous faut voir et porter à notre connaissance que pour que cela soit (triple hybrides), il nous faut deux générations de plantes. Autrement dit, la première année il y a l’hybride (simple H1) qui lui-même s’hybridera avec le parent X ou Y. De ce point de vue j’apporte un peu d’eau au moulin avec les illustrations suivantes :
G. heufleri avec Zygènes; La Punt Chamues'ch (GR / CH) 15.7.2012
G. suavolens avec capsules sèches; St-Luc (VS / CH) 12.7.2006
Ces illustrations nous montrent deux choses : la première, sur l’hybride un potentiel pollinisa-teur avec ce Zygène; et sur la seconde des capsules sèches qui donnent l’impression que ces ovaires étaient plein de graines. Ces graines étaient-elles fertiles ? La question reste entière. Mais aux vues des illustrations qui suivront, je suis en droit de me positionner en faveur d’une possible triple hy-bridations. La réponse à cette question aujourd’hui ne peut se trouver qu’à l’aide de la génétique. Je commence par :
xG. suavolens x G. conopsea
St-Luc (VS / CH) 12.7.2006
Chandolin (VS / CH) 23.7.2013
La longueur des éperons est, à mon avis, une caractéristique pertinente et discriminante. Le positionnement et la forme du labelle en seraient deux autres.
xG. suavolens x G. rhellicani
Chandolin (VS / CH) 14.7.2006
Chandolin (VS / CH) 14.7.2006
Malheureusement ces deux illustrations ne montrent pas la longueur de l’éperon. Par contre le positionnement du labelle et sa forme sont bien visibles. Nous constatons également la couleur particu-lière de ce possible triple hybride au milieu de ses parents respectifs.
xG. heufleri x G. odoratissima
La Punt Chamues'ch (GR / CH) 17.7.2005
Difficile de distinguer l’éperon, mais la forme générale de l’épi, sa couleur particulière, la position du labelle et sa forme me font dire que, certainement, ce peut-être un triple hybride.
xG. heufleri x G. rhellicani
La Punt Chamues'ch (GR / CH) 15.7.2001
Scuol (GR / CH) 16.7.2001
Pas d’éperon visible, malheureusement, mais la forme de l’inflorescence plutôt « rhellicani », la position du labelle et la forme générale de l’inflorescence me font pencher du côté d’une possible triple hybridation.
Cette présentation serait incomplète si l’on oubliait de citer les divers botanistes et orchidophiles qui, au cours des décennies précédentes, ont œuvrés à la compréhension et à l’élargissement de nos connaissances face à ces plantes pour lesquelles il est délicat d’y apporter un nom. Listes non ex-haustive : CAMUS, SCHRÖTER, SCHULZE, KERNER, ASCHERSON, GRAEBNER, GSELL, DANESCH, SCHMID, GERBAUD, GÖLZ, GRIEBL, REINHARD et d’autres que j’oublie certainement.
Je termine par un tableau de mesures (GSELL 1934 et 1942) faite sur les plantes qui nous intéres-sent. Ce sont les lignes et colonnes roses qui me semblent opportun de relever.
Ce sont les longueurs de l’éperon en lien avec la longueur de l’ovaire qui pourrait, à mon sens ap-porter quelques points d’attention. Pour G. conopsea la longueur de l’éperon est quasi le double de celle de l’ovaire (G. odoratissima quasi identique). Pour xG. suavolens nous retrouvons quasi le même rapport longueur de l’éperon / longueur de l’ovaire que G. conopsea. Pour xG. heufleri, l’éperon est la moitié moins long que l’ovaire. Pour le triple hybride xG. suavolens x G. conopsea (xG. suavolens f. megastachya), je trouve important de relever la mesure que GSELL apporte : 7mm pour la longueur de l’ovaire et 6 mm pour la longueur de l’éperon ; presque 1/1.
Dans le cas qui nous intéresse ici, le possible triple hybride G. conopsea x G. corneliana x P. albida, la longueur de l’éperon de conopsea devrait faire que ce dernier apporte la longueur au dit éperon. Sur les mesures que j’ai eu l’occasion de faire en ce qui concerne l’hybride G. rhelicani x P. albida, l’éperon est vraiment court (très petit). Il est d’environ 2 mm de longueur. La longueur de l’éperon de l’hybride G. conopsea x G. rhellicani est d’environ 5 mm. L’ovaire de ce même hybride est de 6 mm.
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Bassecourt, le 9 août 2015
Christophe Boillat
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"Il y a comme des lieux bénis sur la montagne, des lieux particulièrement pittoresques et très beaux avec des orientations différentes où toutes les fleurs semblent s'être données rendez-vous. Et bien ce n'est pas partout qu'il a des lieux tellement miraculeux, tellement beaux, se sont des endroits rares." Ella Maillart parlant de Chandolin.
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Lun 10 Aoû 2015 - 17:16
Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mar 11 Aoû 2015 - 18:09
Bonne remarque, un pdf serait une bonne idée car cet article est vraiment bien compréhensible sur un sujet difficile !!jft2607 a écrit:fort intéressant Christophe .... j'ai toujours du mal à "imaginer" un hybride triple..... mais là tu apportes des éléments qui incitent à la réflexion....
ce post ne pourrait il pas devenir un pdf à ajouter à notre biblio!?
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mar 11 Aoû 2015 - 18:51
Merci pour les compliments, je vais voir ce que je peux faire, mais ça sera pas dans l'immédiat. Si jamais je tarde trop lancez-moi un appel.
Christophe
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mar 11 Aoû 2015 - 19:23
Très intéressant Christophe, ton étude détaillée et illustrée, des putatifs triples hybrides à l'intérieur Genre Gymnadenia.
C'est très vrai que sur le terrain, certains hybrides "simples" nous interpellent car on retrouve presque tous les caractères de l'hybride (aspect, couleur de l'inflorescence) puis en y regardant de plus près, ils ont des caractères plus marqués de l'un des parents, à tel point que l'on peut presque penser qu'on est en face d'un lusus dudit parent.
Je pense, en disant cela à une plante du col du Lautaret vue le 29/06/12, dans un secteur où l'on retrouve chaque année 4 ou 5 G.×suaveolens, dont un an sur deux (?) un hypochrome, de nombreux G.conopsea, et une année, un ×Dactylodenia berninaensis !!! D'emblée, avec Gilles, nous avions pensé à un hybride : même couleur, même forme d'inflorescence... à l'examen de la photo sur ordinateur, j'avais révisé ma position en l'appelant G.conopsea "hyperchrome" et en mettant les résupinations incomplètes sur le compte du début de floraison... Maintenant, grâce à ton sujet, je me repose la question ! Avec Gilles, nous avons une "bonne expérience" des G.×suaveolens (avec G.rhellicani) ou des G.×truongae (avec G.corneliana), pourquoi notre première intuition de le nommer hybride n'était elle pas forcement bonne ? Par comparaison j'illustre en mettant les 3 plantes : l'hybride G.×suaveolens, le "pourquoi pas triple hybride" (G.suaveolens × G.conopsea) et G.conopsea pris le même jour, au même endroit. En prime, j'ai un grossissement de l'éperon et de l'ovaire, du supposé triple hybride qui lui est beaucoup plus proche de G.×suaveolens... dans les mêmes rapports que le ×G.suaveolens f.megastachya...
Que penser aussi de cet hybride vu (parmi la trentaine) au col de l'Izoard le 04/07/15, que j'ai nommé ×G.truongae... ne serait-il pas un G.truongae × G.conopsea ???
Ceci étant dit, je ne vois pas bien, en dehors de la génétique ce qui peut nous permettre de séparer avec certitude ce que l'on pense être des triples hybrides (il faudrait déjà au moins avoir la certitude que l'hybride est fécond...) de la variabilité de l'hybride (qui peut aller de la morphologie d'un parent à l'autre) et même parfois de la variabilité des parents eux-mêmes...
Pour en revenir à l'hypothèse de "notre"triple hybride, il s'agirait d'un triple hybride entre 3 espèces différentes (même si très proches) : 2 Gymnadenia et un Peudorchis (Delforge p150 le nomme G.albida !!) A × B × C . Les combinaisons proposées par Christophe un peu plus haut (tout comme les précédentes) ne sont pas strictement des triples hybrides : A × B ×A ou A × B × B
Au niveau génétique G.corneliana : 2n=40, G.conopsea : 2n=40, P.albida : 2n=40... donc a priori l'hybridation devrait "être permise"
Au niveau morphologique, "notre hybride" ressemble plus à la combinaison Nigritelle × P.albida que nous connaissons bien :
... pas vraiment à la combinaison omniprésente autour de lui (au moins une trentaine) G.conopsea × G.corneliana (ou G.×truongae)
ni à celle possible ici aussi G.conopsea × G.rhellicani (G.×suaveolens)
Trois éléments vont nous perturber :
1) Le nombre de cet "hybride" : 6 pieds dans un tout petit périmètre... c'est très rare, mais cela existe à Chandolin !!
2) A l'observation des photos et de l'éclaté réalité par Olivier : l'éperon est à peine plus court que l'ovaire, incurvé et se termine en pointe. Ceci ne correspond pas à nos propres observations (cf. illustration des ×Pseudadenia micrantha) : l'éperon est nettement plus court par rapport à l'ovaire (rapport 1/2), il est droit et se termine par une demie sphère (comme Pseudorchis). Il est semble avéré que l'éperon ressemble plus à celui de ×G.truongae !!!
Les mesures de GSELL semblent néanmoins démontrer l'inverse (éperon/ovaire : 3/3.5), c'est à dire que le rapport éperon/ovaire de notre hybride est dans la norme des ×Pseudadenia mesurés par GSELL !!
3) Les fleurs à l'inverse des hybrides environnants semblaient avoir souffert de la chaleur et du soleil : la périphérie des pièces florales montrait des "signes de fatigue", ainsi que les boutons sommitaux !! Difficile alors d'affirmer ou d'infirmer que la couleur et la forme correspondent ou non à ×Pseudadenia.
C'est donc en pesant tous ces éléments qu'on peut émettre sans pouvoir trancher trois hypothèses :
soit il s'agit d'un hybride rare G.corneliana × P.albida (déjà vu mais non décrit à ce jour) avec un éperon non classique (variabilité??), soit il s'agit d'un triple hybride G.conopsea × G.corneliana × P.albida (difficile néanmoins à imaginer, car cela n'a jamais vraiment été décrit, sauf dernièrement dans la Drôme avec 3 Orchis et surtout cette possibilité n'a jamais été génétiquement validée...)
soit enfin, il s'agit de lusus de l'hybride fréquent G.×truongae présentant quelques similitudes troublantes avec un ×Pseudadenia....
NB : pour qu'on puisse bien observer les éperons et les ovaires, leur longueur, mais surtout le rapport de leurs longueurs (certainement plus fiable qu'une mesure "au pied à coulisse") j'ai indiqué par une double flèche), quand ils sont visibles leur longueur en jaune (éperon) et rouge ovaire.
Pour un meilleure observation, il faut cliquer sur "agrandir cette image", si c'est insuffisant, cliquer sur "cliquer ici pour la voir à sa taille originale"
C'est très vrai que sur le terrain, certains hybrides "simples" nous interpellent car on retrouve presque tous les caractères de l'hybride (aspect, couleur de l'inflorescence) puis en y regardant de plus près, ils ont des caractères plus marqués de l'un des parents, à tel point que l'on peut presque penser qu'on est en face d'un lusus dudit parent.
Je pense, en disant cela à une plante du col du Lautaret vue le 29/06/12, dans un secteur où l'on retrouve chaque année 4 ou 5 G.×suaveolens, dont un an sur deux (?) un hypochrome, de nombreux G.conopsea, et une année, un ×Dactylodenia berninaensis !!! D'emblée, avec Gilles, nous avions pensé à un hybride : même couleur, même forme d'inflorescence... à l'examen de la photo sur ordinateur, j'avais révisé ma position en l'appelant G.conopsea "hyperchrome" et en mettant les résupinations incomplètes sur le compte du début de floraison... Maintenant, grâce à ton sujet, je me repose la question ! Avec Gilles, nous avons une "bonne expérience" des G.×suaveolens (avec G.rhellicani) ou des G.×truongae (avec G.corneliana), pourquoi notre première intuition de le nommer hybride n'était elle pas forcement bonne ? Par comparaison j'illustre en mettant les 3 plantes : l'hybride G.×suaveolens, le "pourquoi pas triple hybride" (G.suaveolens × G.conopsea) et G.conopsea pris le même jour, au même endroit. En prime, j'ai un grossissement de l'éperon et de l'ovaire, du supposé triple hybride qui lui est beaucoup plus proche de G.×suaveolens... dans les mêmes rapports que le ×G.suaveolens f.megastachya...
Que penser aussi de cet hybride vu (parmi la trentaine) au col de l'Izoard le 04/07/15, que j'ai nommé ×G.truongae... ne serait-il pas un G.truongae × G.conopsea ???
Ceci étant dit, je ne vois pas bien, en dehors de la génétique ce qui peut nous permettre de séparer avec certitude ce que l'on pense être des triples hybrides (il faudrait déjà au moins avoir la certitude que l'hybride est fécond...) de la variabilité de l'hybride (qui peut aller de la morphologie d'un parent à l'autre) et même parfois de la variabilité des parents eux-mêmes...
Pour en revenir à l'hypothèse de "notre"triple hybride, il s'agirait d'un triple hybride entre 3 espèces différentes (même si très proches) : 2 Gymnadenia et un Peudorchis (Delforge p150 le nomme G.albida !!) A × B × C . Les combinaisons proposées par Christophe un peu plus haut (tout comme les précédentes) ne sont pas strictement des triples hybrides : A × B ×A ou A × B × B
Au niveau génétique G.corneliana : 2n=40, G.conopsea : 2n=40, P.albida : 2n=40... donc a priori l'hybridation devrait "être permise"
Au niveau morphologique, "notre hybride" ressemble plus à la combinaison Nigritelle × P.albida que nous connaissons bien :
... pas vraiment à la combinaison omniprésente autour de lui (au moins une trentaine) G.conopsea × G.corneliana (ou G.×truongae)
ni à celle possible ici aussi G.conopsea × G.rhellicani (G.×suaveolens)
Trois éléments vont nous perturber :
1) Le nombre de cet "hybride" : 6 pieds dans un tout petit périmètre... c'est très rare, mais cela existe à Chandolin !!
2) A l'observation des photos et de l'éclaté réalité par Olivier : l'éperon est à peine plus court que l'ovaire, incurvé et se termine en pointe. Ceci ne correspond pas à nos propres observations (cf. illustration des ×Pseudadenia micrantha) : l'éperon est nettement plus court par rapport à l'ovaire (rapport 1/2), il est droit et se termine par une demie sphère (comme Pseudorchis). Il est semble avéré que l'éperon ressemble plus à celui de ×G.truongae !!!
Les mesures de GSELL semblent néanmoins démontrer l'inverse (éperon/ovaire : 3/3.5), c'est à dire que le rapport éperon/ovaire de notre hybride est dans la norme des ×Pseudadenia mesurés par GSELL !!
3) Les fleurs à l'inverse des hybrides environnants semblaient avoir souffert de la chaleur et du soleil : la périphérie des pièces florales montrait des "signes de fatigue", ainsi que les boutons sommitaux !! Difficile alors d'affirmer ou d'infirmer que la couleur et la forme correspondent ou non à ×Pseudadenia.
C'est donc en pesant tous ces éléments qu'on peut émettre sans pouvoir trancher trois hypothèses :
soit il s'agit d'un hybride rare G.corneliana × P.albida (déjà vu mais non décrit à ce jour) avec un éperon non classique (variabilité??), soit il s'agit d'un triple hybride G.conopsea × G.corneliana × P.albida (difficile néanmoins à imaginer, car cela n'a jamais vraiment été décrit, sauf dernièrement dans la Drôme avec 3 Orchis et surtout cette possibilité n'a jamais été génétiquement validée...)
soit enfin, il s'agit de lusus de l'hybride fréquent G.×truongae présentant quelques similitudes troublantes avec un ×Pseudadenia....
NB : pour qu'on puisse bien observer les éperons et les ovaires, leur longueur, mais surtout le rapport de leurs longueurs (certainement plus fiable qu'une mesure "au pied à coulisse") j'ai indiqué par une double flèche), quand ils sont visibles leur longueur en jaune (éperon) et rouge ovaire.
Pour un meilleure observation, il faut cliquer sur "agrandir cette image", si c'est insuffisant, cliquer sur "cliquer ici pour la voir à sa taille originale"
- Olivier GERBAUDOrchid expert
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mar 11 Aoû 2015 - 22:23
Merci Christophe pour cette brillante présentation.
laisse moi juste un peu de temps avant d'analyser ce très beau spot.
(NB/ Déjà, pour moi, il n'y a là que des sous-genres, ce qui rend plus crédibles des hybridations successives...).
Olivier
laisse moi juste un peu de temps avant d'analyser ce très beau spot.
(NB/ Déjà, pour moi, il n'y a là que des sous-genres, ce qui rend plus crédibles des hybridations successives...).
Olivier
- Bifolia
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mar 11 Aoû 2015 - 23:00
Cher Christophe,
Est-ce bien jute de parler d'une triple hybridation ? Je ne vois que deux x dans le nom donc plutôt double hybridation à mes yeux.
Deuxième constatation, n'est-ce pas simplement qu'une hybridation entre deux espèces ayant les caractères soit d'une des parents ou soit de l'autre ?
N'avons pas vu souvent dans ce forum des hybrides N.rhellicani x P.albida passant du blanc crème au rouge foncée ou des inflorescences allongées comme P.albida mais d'autres très coutes comme N.rhellicani?
Bifolia
Est-ce bien jute de parler d'une triple hybridation ? Je ne vois que deux x dans le nom donc plutôt double hybridation à mes yeux.
Deuxième constatation, n'est-ce pas simplement qu'une hybridation entre deux espèces ayant les caractères soit d'une des parents ou soit de l'autre ?
N'avons pas vu souvent dans ce forum des hybrides N.rhellicani x P.albida passant du blanc crème au rouge foncée ou des inflorescences allongées comme P.albida mais d'autres très coutes comme N.rhellicani?
Bifolia
- Christophe BoillatOrchid expert
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mer 12 Aoû 2015 - 8:00
Bifolia a écrit:Cher Christophe,
Est-ce bien jute de parler d'une triple hybridation ? Je ne vois que deux x dans le nom donc plutôt double hybridation à mes yeux.
Deuxième constatation, n'est-ce pas simplement qu'une hybridation entre deux espèces ayant les caractères soit d'une des parents ou soit de l'autre ?
N'avons pas vu souvent dans ce forum des hybrides N.rhellicani x P.albida passant du blanc crème au rouge foncée ou des inflorescences allongées comme P.albida mais d'autres très courtes comme N.rhellicani ?
Bifolia
Au sens strict, ce n'est pas directement une triple hybridation avec trois parents distincts. Il y a soit deux fois G. conopsea, deux fois G. odoratissima ou encore soit deux fois G. rhellicani.
Autre constat : c'est le fait que sur certains hybrides d'Ophrys, la "progéniture" peut ressembler à l'un ou à l'autre des parents. A mon sens seul la génétique peut nous éclairer. La variabilité des hybrides est toujours surprenante. Alors sommes-nous avec des plantes ayant des caractères plus marqués d'un parent sur l'autre ?
Christophe
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"Il y a comme des lieux bénis sur la montagne, des lieux particulièrement pittoresques et très beaux avec des orientations différentes où toutes les fleurs semblent s'être données rendez-vous. Et bien ce n'est pas partout qu'il a des lieux tellement miraculeux, tellement beaux, se sont des endroits rares." Ella Maillart parlant de Chandolin.
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mer 12 Aoû 2015 - 11:40
On se rejoint tout à faitChristophe Boillat a écrit:Autre constat : c'est le fait que sur certains hybrides d'Ophrys, la "progéniture" peut ressembler à l'un ou à l'autre des parents. A mon sens seul la génétique peut nous éclairer. La variabilité des hybrides est toujours surprenante. Alors sommes-nous avec des plantes ayant des caractères plus marqués d'un parent sur l'autre ?
Il parait plus sage d'imaginer qu'on est plus en face de la grande variabilité, que d'imaginer qu'on est en face de triples hybrides (dont on n'est même pas sûr que ce soit génétiquement possible !), même s'il parait légitime d'y songer. Peut être Yves (HY) pourrait-il nous donner un début de réponse ?
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Mer 12 Aoû 2015 - 19:22
En ayant une première hybridation G.conopsea x N.rhellicani avec deux plantes à 2n=40 nous obtenons G. suavolens (G.conopsea x N.rhellicani) avec également 2=40. Je ne vois donc pas de problème pour une seconde hybridation avec l'un des parents. Par contre il faut faire attention il y a également des G.conopsea avec 2n=80 comme G. conopsea var. densiflora alors lä cela se corse car l'hybride passerait à 2n=60 ! Attendons donc les paroles apaisantes de HY...
Ci-dessous deux photos extrêmes de G.conopsea x N.rhellicani, la première d'une inflorescence longue et la deuxième d'une inflorescence courte:
Ci-dessous deux photos extrêmes de G.conopsea x N.rhellicani, la première d'une inflorescence longue et la deuxième d'une inflorescence courte:
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Jeu 13 Aoû 2015 - 9:34
Oui Vincent, "chromosomiquement parlant" cela parait tout à fait possible... mais mon interrogation est : l(es) hybride(s) est-il (sont-ils) fécond ?? Et là, même si intuitivement j'ai envie de dire oui... je n'ai rien vu officiellement quelque chose qui permette de l'affirmer !!Bifolia a écrit:En ayant une première hybridation G.conopsea x N.rhellicani avec deux plantes à 2n=40 nous obtenons G. suavolens (G.conopsea x N.rhellicani) avec également 2=40. Je ne vois donc pas de problème pour une seconde hybridation avec l'un des parents. Par contre il faut faire attention il y a également des G.conopsea avec 2n=80 comme G. conopsea var. densiflora alors lä cela se corse car l'hybride passerait à 2n=60 ! Attendons donc les paroles apaisantes de HY...
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Jeu 13 Aoû 2015 - 9:51
Bifolia a écrit:
Est-ce bien juste de parler d'une triple hybridation ? Je ne vois que deux x dans le nom donc plutôt double hybridation à mes yeux.
Je me suis fais la même réflexion
Un double hybride devrait avoir ses quatre "grand-parents" d'espèces différentes... (un hybride au carré !)
Un triple ? .................................................................................................. (un hybride au cube !)
Cela nécessiterait de nouveaux termes pour désigner ces plantes d'une subtilité remarquable
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Re: Probable triple hybridation ? ! ?
Jeu 13 Aoû 2015 - 15:12
GL a écrit:Oui Vincent, "chromosomiquement parlant" cela parait tout à fait possible... mais mon interrogation est : l(es) hybride(s) est-il (sont-ils) fécond ?? Et là, même si intuitivement j'ai envie de dire oui... je n'ai rien vu officiellement quelque chose qui permette de l'affirmer !!
Oui, telle est la question...j'observe au même endroit depuis des années des hybrides anthropophora x simia : les fleurs ne sont pas fécondées, ou alors une de temps en temps, mais les graines sont elles viables ? Par contre, j'ai vu de nouveaaux hybrides à proximité.
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